Quand la robotique rencontre Darwin, ça donne des machines sacrément étonnantes qui s’inspirent de millions et de millions d’années d’évolution afin de résoudre des problèmes techniques divers et variés.

Bienvenue dans le monde fascinant des robots bio-inspirés !

En effet, au CNRS de Marseille, ça ne fait pas que boire du petit jaune mais ça bosse dur, avec une équipe de chercheurs qui a décidé de prendre la nature comme modèle pour créer des robots plus intelligents, plus efficaces et moins gourmands en énergie.

Leur stratégie ? Observer Gérard Larcher comment les animaux résolvent naturellement des problèmes complexes et adapter ces solutions en version robotique. Et c’est redoutable car ils ont déjà mis au point un robot-fourmi qui navigue sans GPS et un mini-drone qui vole comme un oiseau.

Mais alors pourquoi s’embêter à copier la nature alors qu’on a déjà des robots qui cartonnent ? Eh bien figurez-vous que la nature a quelques longueurs d’avance sur nous car après des millions d’années de R&D (comprendre d’évolution), les animaux ont développé des solutions hyper efficaces et économiques en terme d’énergie.

Prenez les fourmis du désert par exemple… ces minuscules insectes peuvent parcourir des kilomètres sous un soleil de plomb, puis revenir en ligne droite à leur nid sans jamais se perdre. Pas de GPS, pas de carte, pas de panneaux “Fourmilière à 2km, prochaine sortie”… juste quelques neurones et des yeux tout ce qu’il y a de plus basique.

Et c’est exactement ce qui a inspiré le premier robot de l’équipe française : AntBot. Il s’agit d’un hexapode de 2,3 kg décliné également en voiture (AntCar), qui copie le génie de la fourmi Cataglyphis, une championne de l’orientation qui vit dans le Sahara. Pour trouver son chemin sans piste olfactive (la chaleur détruit les phéromones), cette fourmi du désert utilise une boussole solaire et compte ses pas tout en analysant le défilement du paysage.

Les chercheurs ont alors reproduit ces astuces avec des capteurs simplifiés à savoir, une “boussole céleste” électronique sensible à la polarisation de la lumière (comme les yeux de la fourmi) et un capteur optique minimaliste de… 12 pixels seulement ! Oui, vous avez bien lu, 12 pixels. C’est tout nul comme résolution mais ça suffit pour que le robot estime la distance parcourue en observant le flux optique du sol.

Et le résultat est franchement impressionnant car AntBot peut explorer son environnement puis retrouver son point de départ avec une précision d’environ 1 cm après un trajet de 14 mètres. Et tout ça sans GPS, sans Wi-Fi, sans infrastructure externe… juste avec ses propres capteurs et ses algorithmes bio-inspirés.

Mais les chercheurs du CNRS ne se sont pas arrêtés là. Leur second prototype s’attaque à un défi encore plus complexe : le vol.

X-Fly, leur mini-drone de 10 grammes, ne ressemble pas aux quadricoptères classiques avec leurs hélices bourdonnantes. Non, lui bat des ailes comme un petit oiseau ou un papillon, entre 10 et 20 fois par seconde. On appelle ça un ornithoptère, et c’est bien plus difficile à contrôler qu’un drone normal.

La grande force de X-Fly, c’est donc son vol biomimétique car contrairement aux drones à hélices qui doivent constamment consommer de l’énergie pour rester en l’air, X-Fly peut planer entre deux battements d’ailes, comme le ferait un oiseau. Plus économe, plus silencieux, il peut aussi réaliser des manœuvres impossibles pour les drones classiques comme des virages serrés ou des loopings dignes d’Ace Combat. Pour guider ce petit prodige, les chercheurs ont dû développer des algorithmes de pilotage spécifiques qui ajustent en temps réel la flexion des ailes et l’orientation de la queue et les tests en laboratoire sont prometteurs !!

X-Fly peut voler en cercle ou même dessiner un huit dans les airs, de manière entièrement autonome. Alors pour l’instant, le robot-oiseau a besoin de caméras externes pour se repérer, mais l’équipe travaille déjà à embarquer directement des capteurs miniatures pour le rendre totalement indépendant.

Maintenant, vous vous demandez à quoi peuvent bien servir ces drôles de bestioles mécaniques ?

Et bien les applications potentielles sont nombreuses et passionnantes. AntBot, avec ses six pattes et sa navigation autonome, serait parfait pour explorer des terrains accidentés où les robots à roues peinent : zones sinistrées après un tremblement de terre, terrains rocheux, et pourquoi pas la surface de Mars ?

Quant à X-Fly, sa petite taille et son vol silencieux en font un candidat idéal pour de la surveillance environnementale ou les missions de recherche et sauvetage. Imaginez un essaim de ces mini-drones parcourant une forêt dense à la recherche de randonneurs perdus, ou explorant l’intérieur d’un bâtiment effondré pour localiser des survivants… Ce serait ouf !

Au-delà de ces applications directes, les principes développés pour ces robots pourraient transformer d’autres domaines… Par exemple, les algorithmes de navigation minimaliste d’AntCar intéressent déjà les concepteurs de véhicules autonomes… Nos voitures sans chauffeur pourraient alors se passer de GPS et de cartographie ultra-précise. De même, comprendre comment un oiseau stabilise son vol pourrait inspirer de nouveaux dispositifs destinés au secteur de l’aviation, plus économes en carburant.

Bien sûr, la route est encore longue avant de voir ces robots en action hors du laboratoire. AntCar ne fonctionne que de jour (il a besoin de la lumière polarisée du ciel), et X-Fly doit encore affronter les turbulences du monde réel. Mais ces travaux montrent que pour avancer, la technologie doit aussi savoir regarder ce que la nature fait depuis des millions d’années.

Car malgré tous nos progrès technologiques, et nos besoins croissant en énergie, la nature reste une fois encore notre meilleure source d’inspiration, et en combinant biologie et ingénierie, ces chercheurs du CNRS ouvrent la voie à une robotique frugale, plus intelligente, plus économe et peut-être aussi plus respectueuse de notre environnement.